Halte au gaspillage !
Solène Espitalié a fait de la lutte contre le gaspillage alimentaire son cheval de bataille. Elle cumule les trophées parmi lesquels celui du prix des femmes engagées, décerné en 2015.
Comment est né le projet « Les jardins de Solène » ?
De plusieurs constats. Au sein de Solidagri nous devions pérenniser les emplois en milieu agricole de nos salariés handicapés. Nous nous sommes aperçus que des tonnes de fruits et légumes déclassés partaient en déchets. Par ailleurs, les collectivités doivent s’approvisionner en produits locaux dans le cadre de la loi Egalim*. Je leur ai donc proposé des légumes prêts à être cuisinés. A partir de 2016 nous avons pu créer l’atelier de transformation pour valoriser ces productions hors calibre en produits prêts à l’emploi.
*Egalim : “loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous”
Quel est le rôle de l’entreprise « Les jardins de Solène » ?
La restauration collective a besoin d’une plateforme qui regroupe les fournisseurs. Ici aux jardins de Solène nous sommes ce lien entre les collectivités et les petits producteurs locaux ; en d’autres termes, un « food hub ». Nous livrons du produit brut non épluché s’ils veulent le travailler eux- mêmes, ou prêt à être cuisiné en sachets sous-vide. Pour le cuisinier c’est plus agréable et valorisant que de réchauffer des produits surgelés.
L’objectif est de répondre à deux enjeux sociétaux majeurs : le gaspillage alimentaire et la discrimination des personnes en situation de handicap face à l’emploi.
Cinq ans après son ouverture, comment voyez l’avenir de la structure en termes économiques mais aussi comme modèle social ?
En 2022, nous avons valorisé 75 tonnes de produits. Notre objectif est de dépasser les 105 tonnes. Nous pensons qu’il faut aller plus loin que l’anti gaspi. Quand on travaille sur 75 000 kg, il y a 15 000 kg de bio déchets qui peuvent être réemployés. Il faut être cohérent en matière de développement durable. Je suis allée voir les entreprises du coin pour les approvisionner en compost. Nous sommes dans une économie circulaire avec zéro déchet.
Nous nous approvisionnons sans problème avec les produits dits déclassés, mais nous nous engageons aussi dans une nouvelle initiative avec les petits producteurs bio qui vont semer pour nous. Nous sommes convenus en amont avec eux du prix et des quantités que nous allons acheter.
Cet écosystème alimentaire viable peut se développer si les collectivités jouent le jeu en s’engageant au moins un an avec nous. Cela va dans le sens d’une plus grande autonomie alimentaire locale : Des produits qui voyagent plus de 1000 km avant d’arriver dans nos assiettes, c’est insensé !
Quant à l’inclusion des travailleurs handicapés, nous sommes dans une démarche participative et d’autonomie progressive. Parmi ces personnes, certaines qui étaient en IME avant de nous rejoindre ont aujourd’hui des responsabilités au sein de l’équipe !
C’est tout un écosystème innovant que nous construisons sur notre territoire avec tous les acteurs concernés.